La partition, une solution pour le respect des droits de l’Homme des Soudanais du Sud ?

6 09 2014

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Depuis décembre 2013 l’affrontement entre les troupes du président Salva Kier et celles du vice-président Riek Machar, ont repris dramatiquement. Sur le terrain les crimes de guerre et des crimes contre l’humanité sont malheureusement légion. Déjà en mars 2014, Amnesty International dans son rapport « Nowhere Safe Civilians under attack in South Sudan[1] » dénonçait ces crimes exécutés par les deux parties en guerre. Se sont des milliers de civils massacrés, l’usage d’enfants soldats et des viols « qui ont été une constante caractéristique de ce terrible conflit »  selon la mission des Nations unies au Soudan du Sud.

En cela la violence contre les civils Dinka, Nuer ou Shilluk n’a rien a envier à celle commise par les fondamentalistes de l’État Islamique qui sévit en Irak et en Syrie.

 

Un Nuer témoigne des meurtres de soldats Dinkas et de sa vie sauvée par un autre soldat Dinka :

« Dans l’après-midi du 16 Décembre 2013, j’étais à la maison, dans le quartier de Miami Saba, avec ma famille. Ma femme et nos cinq enfants étaient dans notre maison et j’étais assis à l’extérieur sous un arbre avec des parents hommes. Nous avons entendu des tirs à proximité et j’ai couru à la maison d’un voisin. C’est un soldat et un bon ami Dinka. Je suis resté caché dans sa maison et nous avons vu deux camions, des pick-up Toyota, pleins de soldats. Nous les avons entendus tirer dans ma maison … [Après le départ des soldats] nous avons trouvé 7 de mes parents morts, abattus par les soldats. L’un d’eux … avait reçu une balle dans le dos du cou, alors qu’il se rendait à la maison. Les six autres ont tous été tués près de l’arbre où on les avait  assis… tous ont été touchés à la tête et dans le haut du corps. Nous avons trouvé ma femme terrifiée et mes enfants blottis dans la maison. Les soldats étaient partis, ils avaient pris l’argent, plusieurs téléphones, un ordinateur et le téléviseur. Mon voisin nous a emmenés chez lui pour la nuit. Le jour suivant, il nous a conduit, ma femme et mes enfants à la base de la MINUSS; il nous a sauvé la vie. Il savait que ses collègues étaient venus pour « tuer du Nuer » et il ne pouvait pas les arrêter, en nous cachant dans sa maison il nous a sauvé. Ce jour là, des soldats allaient de maisons en maisons à la recherche de la Nuer »[2]

 

Pour certains Dinkas c’est la même peur qui règne. L’un d’eux raconte qu’il était hospitalisé à l’hôpital Bor de Malakal[3] lorsque le  19 Février 2014 :

« plusieurs groupes de rebelles Nuer vinrent à l’hôpital, ils portaient un mélange d’uniformes et de vêtements civils. J’étais dans la salle de la tuberculose avec quatre autres personnes. Les rebelles ont abattu les quatre personnes dans les lits à côté du mien, y compris Aban, un homme de 65 ans qui était très vieux et malade. J’ai gardé les yeux fermés et je n’ai pas bougé pendant qu’ils tiraient… J’ai vu plus tard  que les quatre autres personnes étaient mortes. Peut-être qu’ils ne m’ont pas tué parce que je ne ressemble pas à un Dinka ou Shilluk, je ne sais pas. Avant de tirer sur les autres, ils ont pris tout mon argent. Il y avait un 550 livres soudanaises du Sud [138 USD], tout l’argent que j’avais. Plus de personnes ont été tuées dans différentes parties de l’hôpital et la cour et beaucoup de gens se sont enfuis à la base des Nations unies. »[4]

 

Une Afrique qui ne sort pas de l’appartenance ethnique ?

Trop souvent encore les analystes occidentaux invoquent des logiques ethniques dans les guerres africaines. Ici ce seraient les Dinkas du président Salva Kier contre les Nuers de son rival Riek Machar, comme s’il fallait toujours réduire les conflits africains à l’appartenance ethnique du chef de guerre. Pourtant les sources des affrontements armés sont profondément ancrées dans notre temps, à savoir le contrôle des ressources naturelles ; en l’occurrence les nombreux champs de pétrole. Aujourd’hui malheureusement ces violations graves et systématiques des droits de l’Homme ont conduit à un repli identitaire et ciblent maintenant les groupes ethniques. Replis identitaires que nous connaissons bien en Europe, les récentes guerres de l’ex Yougoslavie, ainsi qu’aujourd’hui en Ukraine, sont là pour nous le rappeler[5].

Il faut également avoir en mémoire l’autisme des pays membres des Nations unies lorsque  Amnesty International dénonçait dès 2010 les transferts d’armes classiques au gouvernement du Soudan du Sud qui risquaient de déstabiliser la région. En effet, entre 2007 et 2008, avant même la déclaration d’indépendance, des tonnes d’armes avaient été livrées avec de faux certificats d’utilisations finales en direction du Kenya[6] ; comble de l’ironie ou du cynisme, ce pays était un des co-auteurs du traité sur le commerce des armes en discussion aux Nations unies. Le secrétariat international d’Amnesty avait alors reçu des documents qui décrivaient assez précisément les armes réceptionnées à Juba :

Des chars T72 M1 et T72 M1K, des munitions de 125 mm, des lances rockets multiples BM21, au moins 21 canons anti-aériens ZU 23-2 / ZPU-4 ; des lance rockets RPG 7 et entre 10 000 et 40 000 fusils d’assauts AKM qui venaient d’Ukraine[7].

Les États Unis aussi, notamment sous la pression des fondamentalistes chrétiens, s’étaient largement engagés dans le soutien  au  Sudan People’s Liberation Army  (SPLA). Les militaires étasuniens avaient formé l’armée du SPLA, pour plus de 100 millions de $ en 2011 et les avaient également équipés en armes. Or il est fort probable que des militaires formés par les États Unis puissent être impliqués dans les crimes de guerre et crimes contre l’humanité dénoncés dans le rapport. Quant aux armes livrées, pour certaines d’entre elles, elles ont été utilisées en 2012, notamment les chars T72 dans des affrontements entre ces mêmes factions[8].

 

L’histoire se répète encore ces derniers mois puisque malgré ces crimes de guerre et crimes contre l’humanité, la Chine vient de livrer des armes aux deux parties engagées dans le conflit. Selon l’information du département armes d’Amnesty International il s’agit de plus de 1000 tonnes d’armes – dont des lances roquettes, des milliers de fusils d’assauts et de lanceurs de grenades, 20,000 grenades, des centaines d’armes de poing et de mitrailleuses et plusieurs millions de munitions[9] – transportéeq par un navire basé à Hong Kong le « Feng Huang Song ». Il aurait quitté les ports de Dalian le 8 mai puis celui de Zhanjiang le 15 mai 2014[10] pour décharger sa cargaison d’armes le 7 juin à Mombassa au Kenya avant leur transport vers les utilisateurs finaux.

Cette livraison devrait alerter les pays africains pour obtenir de la Chine la suspension immédiate de toute livraison d’armes vers ce pays. C’est ce qu’ont  fait les États Unis depuis décembre 2013 ainsi que l’Union Européenne qui a élargi l’embargo sur le Soudan au Soudan du Sud depuis 2011. Prudente lors des négociations du traité sur le commerce des armes (TCA), les délégués chinois avaient même laissé entrevoir une signature du TCA adopté en avril 2012, leur pratique actuelle est un véritable défi lancé aux peuples africains.

Mais l’arrêt immédiat des livraisons d’armes au Soudan du Sud n’est pas une mesure suffisante car comme en Irak, ce pays est « inondé d’armes » ; pourtant aucune d’entre elles n’ont été fabriquées au Soudan du Sud. Il s’agirait donc pour la communauté internationale et principalement pour les pays qui ont exporté ces armes de prendre leurs responsabilités. Il n’est pas interdit de rêver, le Conseil de Sécurité de l’ONU pourrait appeler à la création d’une large coalition afin de faire respecter un embargo strict sur la région et de proposer une résolution de ce conflit avec un programme de désarmement, démobilisation et de réintégration (DDR) – ainsi que d’identification et de traçage des armes – qui s’inscrive dans le temps avec de véritables moyens de mise en œuvre. Ce serait un acte  clair et identifiable comme une réponse aux pays sceptiques et opposants au TCA qui dénonçaient le risque d’instrumentalisation du droit international.

Une coalition internationale pour « étouffer » un conflit au lieu de le raviver en armant un camp contre un autre voilà une rupture dans la protection des droits de l’Homme qui serait enfin novatrice.

 

Benoît Muracciole

[1] http://www.amnesty.org/en/library/asset/AFR65/003/2014/en/3f5822f7-8594-4a64-a6c8-3ece02be1eca/afr650032014en.pdf

[2] Ibid page 19.

[3] Au nord du Soudan du sud

[4] Page 25 : http://www.amnesty.org/en/library/asset/AFR65/003/2014/en/3f5822f7-8594-4a64-a6c8-3ece02be1eca/afr650032014en.pdf

[5] La désignation des Roms comme un peuple de voleurs ou de profiteurs « qui n’ont pas vocation à s’intégrer » montre bien que ce « lointain » et archaïque réflexe identitaire est aussi utilisé par les politiques européens jusque dans le pays des droits de l’Homme.

[6] http://www.amnesty.org/en/for-media/press-releases/arms-trade-fuels-violations-sudan-conflict-2011-07-08

[7] Il n’est pas établi à ce jour si le gouvernement ukrainien de l’époque savait que la véritable destination de ces armes était le gouvernement du Soudan du Sud.

[8] http://www.amnesty.org/en/news/south-sudan-arms-supplies-fuelling-violations-forgotten-conflict-2012-06-27 et http://www.amnesty.org/en/library/asset/AFR65/002/2012/en/67d8e84c-e990-42de-9a99-1486aab18b1d/afr650022012en.pdf

[9] Contrat signé avec la firme chinoise NORINCO pour plus de 38 millions $.

[10] UN: South Sudan arms embargo crucial after massive Chinese weapons transfer 17 juillet 2014 : http://www.amnesty.org/en/news/un-south-sudan-arms-embargo-crucial-after-massive-chinese-weapons-transfer-2014-07-17





Depuis le 3 juin 2013, 72 Etats ont signé le traité sur le commerce des armes, quelle est la prochaine étape ?

17 06 2013
Signature de l'Ambassadeur Suédois. Capture d'image

Signature de l’Ambassadeur Suédois Paul Beijer. Capture d’image

Il y a maintenant deux semaines les  premières  signatures du traité sur le commerce des armes des Etats, 67[1] rapidement suivies par 5 autres pays[2], ont montré que l’élan donné il y a plus de 6 ans à l’ONU ne faiblit pas. Les 7 co-auteurs[3] des résolutions du TCA depuis 2006, ont bien entendu tous signé et certains d’entre eux étaient même représentés à un haut niveau. Ce fut le cas avec M. Alfio Piva Mesén, Vice Président du Costa Rica qui continue de marquer avec vigueur son engagement au TCA, projet que son pays avait redynamisé en 1995 avec les prix Nobel de la paix Don Oscar Arias et Amnesty International.  Pour d’autres pays ce sont des ministres qui sont venus parapher ce texte avec en premier lieu l’Argentine et  l’Australie, 2 pays qui avaient successivement présidé les travaux du TCA aux Nations Unies. Avec dans un premier temps, l’ambassadeur Roberto Garcia Moritan, de 2007 à 2012, puis l’ambassadeur Peter Woolcott pour la conférence finale de mars 2013 ; ils sont entrés eux aussi dans l’histoire. La présence des ministres de l’Allemagne, de l’Espagne,  de la Finlande,  de la Grande Bretagne, de Grenade, de l’Irlande, de l’Italie, du Mexique, de la Norvège, de Trinidad et Tobago a signifié avec force l’engagement de ces pays pour le futur du TCA.

La France qui ne partage pas cette vision sur l’importance des symboles, signa par l’intermédiaire de son ambassadeur aux Nations unies. Dommage car l’expertise de ce pays ainsi que sa place, un temps, de co leader du processus aurait mérité une représentation plus significative.  Enfin l’absence des Etats Unis n’est pas une surprise et correspond à la difficulté que ce pays a eu pour entrer dans les négociations.  Mais ce n’est qu’une histoire de temps et John Kerry, que l’on entend plus que Laurent Fabius sur ce sujet, à déclaré que son pays signerait : « lorsque le processus d’homologation des traductions officielles serait achevé  ». Un langage diplomatique pour laisser retomber le soufflet des opposants étasuniens au TCA et de donner du temps aux juristes du département d’Etat et du Pentagone de se rassurer sur le texte. Quant aux 2 autres membres permanents du Conseil de Sécurité il y a d’abord la Chine. Celle ci qui s’était retranchée derrière une histoire de procédure pour ne pas voter le 2 avril, devrait signer avec l’aide de l’Afrique. Enfin pour la Russie, au cœur de l’actualité avec son soutien en terme de livraison d’armes au régime syrien. Le G8, qui s’ouvre aujourd’hui en Irlande du Nord, pourrait être une occasion de rassurer ce pays sur les vraies intentions du TCA. Rêvons un peu, cela pourrait passer par une reconnaissance du dépassement de la résolution 1973 par l’OTAN en Libye… En d’autres termes il faut donner des gages au gouvernement russe, tout en maintenant la pression des pays arabes sur elle, pour lui permettre de sortir la tête haute de cette situation. Je continue de penser que leur projet de conférence de paix à Genève, sur la Syrie, peut s’inscrire dans un processus positif de résolution de ce conflit[4].

Même si certaines ONG espéraient un nombre plus important, ce chiffre est significatif au moins parce qu’il dépasse le nombre d’Etats nécessaire à son entrée en force[5]. L’article 22 du traité précise en effet qu’il entrera en vigueur 90 jours après la 50° ratification. Celle ci viendra après un vote des Parlements nationaux.

Il s’agit maintenant de pousser à signer les Etats  qui ont voté le texte le 2 avril dernier – avec une adoption par 156 voix il reste donc 84 pays à  ce jour – car leur adhésion sera également une pression supplémentaire sur ceux qui se sont abstenus. C’est au niveau des capitales que ce travail doit d’abord se faire. Les nombreuses ONG qui ont été engagées ces dernières années dans la campagne ont, bien sûr, un rôle important à jouer. Mais il ne faut pas oublier non plus tous les réseaux diplomatiques des Etats, à commencer par celui des pays co-auteurs et aussi celui de la France. Il y a également les instances régionales comme la CEDEAO et la CARICOM ainsi que le Protocole de Nairobi et la SACD, qui furent une force pendant les négociations. Enfin des organisations régionales qui ont des moyens comme l’Organisation des Etats Américains, l’Union Européenne  se doivent d’être un relais efficace pour ce nouveau temps du TCA. C’est au plan régional que ce travail de conviction pourra avoir de la force sur les pays qui ont hésité comme l’Inde. Les Etats africains encore une fois, et dans la logique de cette dernière année de négociation, sont devenus le principal moteur de conviction pour ce TCA.

Enfin l’élection de Hassan Rohani pourrait aussi faire bouger les lignes de l’Iran sur le TCA. Pendant toutes ces années de rencontres et discussions avec les délégués iraniens au Nations unies, je n’ai jamais senti une opposition absolue aux objectifs ni aux principes, dont les droits de l’Homme, du TCA. L’Iran m’a semblé plus régler ses comptes avec un occident qui de nombreuses fois a été pour le moins partial dans ses interventions régionales[6]. Le temps nous éclairera sur les nouvelles dispositions de l’Iran, mais la place laissée à l’Iran dans la résolution du conflit syrien  sera un signe probant de la capacité de l’occident à se projeter dans une logique d’apaisement.

Benoît Muracciole


[1] Allemagne, Argentine, Bahamas, Costa Rica, République dominicaine, Estonie, Finlande, Grenade, Trinité-et-Tobago, Australie, Espagne, Islande, Irlande, Italie, Mexique, Norvège, Royaume-Uni, Albanie, Antigua-et-Barbuda, Autriche, Belgique, Belize, Bénin, Brésil, Burkina Faso, Burundi, Chili, Côte d’Ivoire, Croatie, Chypres, Danemark, Djibouti, France, Grèce, Guyana, Hongrie, Jamaïque, Japon, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Mali, Malte, Mauritanie, Monténégro, Mozambique, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, Palaos, Portugal, République de Corée, République tchèque, République-Unie de Tanzanie, Roumanie, Sainte-Lucie, Saint-Vincent-et-les Grenadines, Sénégal, Seychelles, Slovénie, Suède, Suisse, Suriname, Togo, Tuvalu, Uruguay .

[2] El Salvador, Liberia, Slovakia, Rwanda et St Kitts and Nevis

[3] Argentine, Australie, Costa Rican Finlande, Japon, Kenya et Royaume-Uni

[5] Il avait fallu une année pour que la CPI réunisse 66 signatures.

[6] En plus du soutien armé aveugle au régime de Sadham Hussein, la résolition 476 de l’ONU qui demande un  cesser le feu sans demander à l’agresseur irakien de se retirer, est encore dans la mémoire collective de ce pays. Cette guerre a fait plus d’un million de morts du coté iranien.





Les pays Africains fortement impliqués sur les négociations du traité sur le commerce des armes

21 03 2013





New York ONU Dernier jour de négociation; pour le traité sur le commerce des armes fort et efficace ?

27 07 2012





Petit bilan intermédiaire après deux semaines de négociations du traité sur le commerce des armes

16 07 2012

Evènement du jeudi 12 juillet Amnesty International et le IANSA alertent sur les violences sexuelles. Photos Benoît Muracciole

D’abord il est important de noter que, malgré l’humeur maussade de quelques Etats sceptiques,  l’immense majorité des Etats sont pour un traité fort et efficace allant dans le sens du texte du Président Roberto Garcia Moritan de mars 2012[1].  Cette affirmation simple est largement confirmée par les déclarations des Etats comme je l’ai déjà écris ici. Même à l’intérieur des continents les majorités se déclarant pour des critères intégrant les droits de l’Homme et le droit international avec l’obligation d’une évaluation substantielle du risque d’usage des armes, sont importantes, voir écrasantes.

C’est le cas pour l’Amérique à part les Etats Unis, le Venezuela et Cuba. En effet pour des raisons biens diverses ces Etats, aux vues et intérêts quelques peu divergents, se retrouvent presque sur une ligne sceptique. Les Etats Unis parce qu’ils réagissent encore dans un vieux reflexe de toute puissance, rien de meilleur de ce que nous avons déjà ne peut venir de l’extérieur, oubliant les engagements de leur Président Obama en matière de multilatéral.

Pour Cuba et le Venezuela il y a bien sûr une crainte de se voir refuser de s’armer pour la défense légitime de leurs territoires. On peut comprendre la prudence de Cuba dans ces négociations vis à vis de son énorme voisin du nord. Néanmoins il semble que ce dont ce pays a le plus à craindre aujourd’hui, est l’arrivée massive d’armes. Avec en plus des Etats Unis, Haiti ou leur dissémination provoque un  niveau d’homicide très important[2] et la Jamaïque qui connaît elle aussi un des taux d’homicide les plus élevés du monde[3], Cuba a besoin d’un TCA avec des critères rigoureux sur les droits de l’Homme et le droit international humanitaire.

Pour le Venezuela qui connaît un taux de criminalité semblable à la Jamaïque et à Port au Prince, la position tenue par Hugo Chavez apparaît encore aujourd’hui bien loin des besoins et des urgences de son pays. Nous verrons comment la société civile  vénézuélienne pourra peser dans le bon sens.

Pour le continent Africain nous l’avons écrit et répété ici, pour l’Algérie et l’Egypte il est politiquement suicidaire à moyen terme de s’afficher auprès de la Syrie et de la Corée du Nord. C’est d’autant plus dommageable pour l’Algérie qu’elle n’a pas attendu le TCA pour mettre en place un système de contrôle des exportations d’armes classiques extrêmement rigoureux[4] et qu’elle est partie prenante à toutes les Conventions sur les droits de l’Homme de l’ONU et bien sûr de la Convention de Genève.

L’Union Européenne est également concentrée sur une position cohérente même si la France, l’Allemagne et la Grande Bretagne sont, en tant que pays exportateurs d’armes majeurs,  les plus engagés dans la volonté d’un TCA fort sur les critères. Seuls les Italiens renâclent et tentent d’exclure les armes civiles de la liste des armes comme si celles ci n’étaient pas utilisées dans de graves violations des droits de l’Homme en Afrique et en Amérique.

L’Océanie, même si le continent est moins important en terme de nombre d’habitants est dans une dynamique extrêmement positive avec l’Australie, le Japon et la Nouvelle Zélande mais aussi la Papouasie Nouvelle Guinée et même Palau qui courageusement est présente avec ses plus de 20 000 habitants.

L’Asie cherche encore, dans une aspiration mêlée de craintes et  d’attirance positive, son intérêt dans le futur TCA. Car cet immense continent est également victime du commerce irresponsable des armes classiques avec l’Afghanistan, le Cambodge, l’Inde, L’Indonésie, L’Irak, le Pakistan et les Philippines… Mais il reste un travail de pédagogie à faire à la fois au niveau des capitales et ici à l’ONU pour convaincre ces Etats de leur intérêt politique et stratégique d’y adhérer. Même la Chine a entrevu pour elle même des avantages comme par exemple d’avoir une Afrique où son approvisionnement en matière première sera libéré des conflits intra étatiques.

Enfin le Moyen Orient dont les peuples appellent tous les jours à l’arrêt des bombardements en Syrie, les arrestations arbitraires qui persistent en Lybie et des forces de l’ordre au Bahreïn, en Egypte qui respectent enfin les procédures les plus élémentaires pour le respect des droits de l’Homme.

De ce magma brulant des deux premières semaines, les Etats se doivent de trouver une issue pour le bien commun de tous. Les Russes ont commencé en recevant les ONG africaines. Ils ont fait par de leur proposition de mettre les critères dans la transposition en droit interne du TCA. Les Etats Unis doivent se souvenir que leur Président à reçu le Prix Nobel de la Paix comme une promesse à venir, il est temps de s’y mettre Barak Obama, le TCA c’est maintenant !

Benoît Muracciole