C’est aujourd’hui à 10h30 heure de New York que le Président des Comités Préparatoires, Roberto Garcia Moritan, a diffusé son texte de projet de traité auprès des délégations. Ce texte représente le point de vue du Président après les 4 semaines de pré négociations qui se sont déroulées en trois fois, à l’ONU depuis juillet 2010. Ce premier texte qui prend, reprend toute l’architecture du TCA, est censé refléter les différentes interventions des Etats sur le traité, mais il n’engage pas ces derniers. L’exercice se limite donc à préparer les véritables négociations, les quatre semaines consécutives, en 2012, comme inscrit dans la résolution de décembre 2009[1]. Il ne reste donc qu’un Comité Préparatoire en 2012 pour fixer les procédures de décisions de la conférence finale et de consolider le texte présenté.
On continue dans la ligne théâtrale du jour précédent, non pas avec le Canada qui a les neurones définitivement pris dans la glace et qui demande l’exclusion des armes de chasse et de sport du TCA. Il a oublié de profiter d’une pensée de Pierre Dac qui disait fort à propos : « Quand ça ne tourne pas rond dans le carré de l’hypoténuse, c’est signe qu’il est grand temps de prendre les virages en ligne droite. ». Il s’est d’ailleurs pris gentiment un retour de culasse de la part du Mexique qui lui a expliqué que ces fusils étaient justement utilisés par les Cartels mexicains contre les populations civiles. À ce rythme, le Canada est en passe de devenir rapidement le 51° Etat de son grand voisin étasunien, qui lui par contre sait faire le show. Car avec la délicatesse de l’inspecteur Harry et dans un élan de tristesse bien compréhensible, le délégué des Etats Unis a refusé toute la deuxième partie des critères qui engage la responsabilité des Etats dans l’évaluation du risque substantiel de l’usage des armes classiques. Autant dire l’âme du TCA.
Heureusement, ce jeudi était prévu pour laisser la parole aux ONG, afin qu’elles adressent en plénière, leurs visions des enjeux que posent le TCA. Tout cela dans une conception large des sociétés civiles puisque les représentants de l’industrie et la NRA[2] étaient présents.
C’est comme cela que le grand ami de la poésie, Wayne Lapierre vice Président exécutif de la NRA, nous a fait part de la vision indigne qu’il a du TCA. Il a sans doute dû le confondre avec une recette de tarte aux abricots quand il a déclaré quelque chose comme, « je mettrai à genoux le traité si vous touchez aux armes des civils ou au second amendement ». Cet amendement dont de nombreux juristes disent qu’il ne concerne en rien le droit des citoyens de porter une arme[3].
Enfin il a rappelé que tout traité ne sera possible qu’avec l’accord des 2/3 du Sénat, ce qui est exact, et que la vie elle même est une douleur vive qui ne s’estompe qu’au doux bruit du fusil d’assaut sous le clair de lune des vertes vallées du Michigan.
Enfin, l’Ambassadeur Eric Danon a profité d’une clôture des débats un peu anticipée, pour rencontrer les ONG, et leur faire part de la vision qu’il avait du futur traité. Exercice intéressant car il sort un peu d’une convention de langage onusien et permet, aux deux parties, d’adresser un certains nombre de points plus directement.
Demain nous aurons certainement les déclarations d’autres Etats, dont les Chinois, les Français et les Russes, histoire de repartir sur une note, je l’espère, un peu plus légère. Car comme disait Pierre Dac avec une grande pertinence : « Un très ancien proverbe birman dit : »Rien ne sert de courir si on n’est pas pressé et rien ne sert de marcher si on n’est pas foutu de se tenir debout ».
Benoît Muracciole
[1]Vous pouvez comparer l’évolution de ces textes sur : https://armerdesarmer.wordpress.com/rapports/
[2] National Rifle Association, un puissant lobby pro armes aux Etats Unis