Décembre 2013, un nouveau sommet France Afrique à l’Élysée ?

5 12 2013
Salle de l'Assemblée Générale de l'ONU. Photo Benoît Muracciole

Salle de l’Assemblée Générale de l’ONU. Photo Benoît Muracciole

Les pages des décennies de la « Françafrique », pendant lesquelles le génocide du Rwanda représente la tragédie la plus ineffaçable, se tournent bien difficilement. Pendant toutes ces années la France avait soutenu des régimes autoritaires notamment en leur livrant des armes et en formant leurs armées ou leurs gardes présidentielles. Les gouvernements de droite et de gauche ont fermé les yeux sur les graves violations des droits de l’Homme, les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité des dictateurs en arguant que la stabilité du continent primait. En contrepartie elle bénéficiait, comme de nombreux pays occidentaux, du pillage des ressources naturelles[1] et de grands contrats passés au bénéfice de ses entreprises[2].

L’implosion de ce système, dans le début des années 2000, aurait dû obliger un repositionnement de la réflexion de la France dans sa relation, non plus avec le continent, mais avec chaque pays du continent africain. La nouvelle génération qui arrivait au pouvoir en France laissait espérer une relation plus équilibrée avec les pays de ce continent. Malheureusement le multilatéralisme de Lionel Jospin premier ministre, a fait long feu et le raté historique de la Présidence de Nicolas Sarkozy – avec notamment le discours de Dakar, le soutien à Dos Santos en Angola[3], l’intervention militaire en Côte d’Ivoire[4] et, comme point d’orgue, celle en Libye avec  l’affaire Mouammar Kadhafi[5] – nous a montré que si les générations changeaient, ce n’était pas encore le cas de la politique.

Le titre de la rencontre « le Sommet de l’Elysée pour la Paix et la Sécurité en Afrique » tente visiblement d’éviter toute accusation de la construction d’une nouvelle « Françafrique ». Ce sommet promet un habile passage de l’habituel concept de stabilité, qui avait signifié ce soutien inconditionnel aux vieux et jeunes potentats[6], à un concept de sécurité.

Mais qu’est ce que la sécurité ?

Est ce l’assurance que les pays africains de la méditerranée  vont s’engager à bloquer efficacement toute tentative d’immigration vers l’Europe en général, et vers la France en particulier ?

Que les États, qui bénéficient des transferts d’armes et de la formation de la France pour sa police et son armée, ne soient pas inquiétés quand ils les utilisent dans de graves violations des droits de la personne ?

Que la justice des personnes s’arrête aux frontières de celles des chefs États ?

Que les prix des matières premières africaines vont, irraisonnablement, ne pas augmenter ?

Que les pays africains vont assurer de nouveaux contrats aux entreprises françaises ?

Où, rêvons un peu, est-ce au contraire pour que tous les pays présents, dont la France, développent enfin une politique en accord avec la déclaration universelle des droits de l’Homme :

A commencer par la République Démocratique du Congo de Kabila et l’article 3 où : « Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sûreté de sa personne[7]. »

Le Tchad d’Idriss Deby et l’article 5 « Nul ne sera soumis à la torture, ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants[8]. »

La Guinée équatoriale de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo avec l’article 6 « Chacun a le droit à la reconnaissance en tous lieux de sa personnalité juridique[9]. »

Et la République du Congo de Sassou Nguesso avec l’article 9 où : « Nul ne peut être arbitrairement arrêté, détenu ou exilé[10]. »

La France de François Hollande avec l’article 13 où : « Toute personne a le droit de circuler librement et de choisir sa résidence à l’intérieur d’un Etat. Toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays[11]. »

L’Algérie d’Abdelaziz Bouteflika avec l’article 20 «Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit[12]. »

Et enfin pour tous les États présents avec l’article 23 « Toute personne a droit au travail, au libre choix de son travail, à des conditions équitables satisfaisantes de travail et à la protection contre le chômage. Tous ont droit, sans aucune discrimination, à un salaire égal pour un travail égal. Quiconque travaille a droit à une rémunération équitable et satisfaisante lui assurant ainsi qu’à sa famille une existence conforme à la dignité humaine et complétée, s’il y a lieu, par tout autre moyen de protection sociale. Toute personne a le droit de fonder avec d’autres des syndicats et de s’affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts.

Alors oui si c’est de cette sécurité qu’il va s’agir pendant ces deux jours à l’Élysée, nous en excuserons la forme et en attendrons patiemment les effets à l’intérieur de cette immense et même frontière que représente l’Afrique et la France.

Benoît Muracciole


[1] Qui alimentait aussi une corruption de ces chefs d’États africains : Bois, Coltan, Diamants, Pétrole, Uranium…

[2] Notamment : Areva, Becob, Bouygues, Bolloré, Rougier, Compagnie Française de l’Afrique Occidentale, Total, Vinci, Veolia…

[3] Pays où ont encore lieu de graves violations des droits de la personne. Voir notamment Angola. Les cinq ans de paix n’ont pas bénéficiés ceux qui vivent dans des abris de fortune 2007 : http://www.amnesty.org/fr/library/info/AFR12/003/2007/fr Angola. Des prisonniers auraient été soumis à d’effroyables violences, d’après une vidéo choquante mai 2013 : http://www.amnesty.org/fr/for-media/press-releases/angola-shocking-footage-appears-show-appalling-abuse-prisoners-2013-08-28 et le classement de Transparency International où le pays est classé à la  153ème place des pays les plus corrompu sur 177.

[6] Avec notamment ces grands démocrates : Felix Houphouët-Boigny, Bongo père et fils, Eyadema père et fils, Ben Ali,  Mobutu puis Kabila père et fils, Paul Biya, Juvénal Habyarimana, Hosni Moubarak, Denis Sassou Nguesso, Hissène Habré puis Idriss Deby, Jean-Bedel Bokassa…

[7] Le conflit dans ce pays a fait plus de 5 millions de morts avec des crimes de guerre et crimes contre l’humanité : https://armerdesarmer.wordpress.com/2013/07/30/la-republique-democratique-du-congo-un-echec-continue-de-la-justice-internationale/

[9] Rapport Amnesty International 2013 page 125

[10] Rapport Amnesty International 2013 page 72

[11] À quand la fin des expulsions forcées des Roms en France ? http://www.amnesty.org/fr/news/france-record-number-forced-evictions-2013-09-25

[12] Rapport Amnesty International 2013 page 10.





Quelques leçons du vote historique des Nations unies en faveur du traité sur le commerce des armes.

9 04 2013
Vote aux Nations unies. Photo Benoît Muracciole

Vote aux Nations unies. Photo Benoît Muracciole

Le vote aura finalement donné : 156 pour 3 contre et 22 abstentions. La Corée du Nord, la Syrie et l’Iran se sont donc à nouveau opposés, après avoir bloqué l’adoption par consensus le jeudi 28 mars, au traité sur le commerce des armes. Si le rejet des deux premiers pays n’est pas franchement une surprise au vu de leurs constantes pratiques de graves violations des droits de l’Homme et du droit international humanitaire, la présence de l’Iran pose plus question. Car malgré le soutien armé de ce pays au régime de Bachar el Assad pour des raisons grandement contestables[1], la déclaration du Président Mahmoud Ahmadinejad[2] nous avait laissé  espérer une position moins négativement affirmée sur le TCA. Il n’en a rien été, le règlement de compte, de type OK Corral, entre le guide de la révolution Khamenei et le Président iranien ont eu raison du consensus[3]. Voilà ce grand pays – qui a particulièrement souffert des transferts d’armes irresponsables des pays occidentaux vers son voisin d’alors Saddam Hussein – s’opposer à un TCA qui justement le protégerait de pareilles attaques. Il est parfois des moments dans l’histoire où la pression que subissent les Etats les amène à prendre des positions, dans le court terme, fondamentalement contraires à leur intérêt national sécuritaire du moyen et du long terme. Ce fut, me semble-t-il, le cas de l’Iran mais il n’est pas interdit de voir cette position  évoluer à l’avenir.

La question des abstentions me semble être plus importante encore du fait de  leur nombre ainsi que du poids des pays dans le domaine des transferts d’armes classiques. D’abord avec les deux pays membres du Conseil de Sécurité ; la Chine et la Russie mais aussi avec des Etats gros importateurs d’armes comme l’Inde, et les pays du Golfe.

Les avancées considérables de la Chine dans les temps des négociations – grâce aux pays africains et notamment la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO)- quant à sa compréhension du traité m’avaient fait penser que ce pays voterait favorablement. Son explication de vote, elle regrette que ce texte passe par le vote et que certaines de ses demandes n’aient pas été intégrées, n’est pas convaincante car la frustration  est presque le propre d’une bonne négociation. Mais après la déclaration de Lamido Sanusi le 11 mars[4], où le gouverneur de la banque du Nigeria appelait l’Afrique à reconsidérer sa relation avec la Chine, cette dernière ferait également bien de repenser avec attention les domaines où l’Afrique à besoin de la Chine, pour y répondre. Au vu du vote du continent africain en faveur du traité, 47 Etats sur 54, il y a une indication qui semble claire.

Cette tendance concerne aussi l’Inde qui comme la Chine et pour les 30 prochaines années, va avoir besoin des matières premières de l’Afrique. La compétition que ces deux grands Etats vont livrer sur le continent africain afin d’assurer leur rythme de développement économique ne se fera plus au détriment des Etats africains. S’il est vrai que dans un premier temps les offres de prêts ont pu faire oublier aux chefs d’Etats certaines règles de base dans les contrats passés avec les firmes chinoises, l’appel de Lamido Sanusi et les mobilisations des sociétés civiles va ramener de fait à plus de sagesse dans un avenir proche.

Alors qu’elle a obtenu un certain nombre de points, notamment la référence à la lutte contre les transferts illicites, la Russie, qui était comme la Chine prête à adopter le texte par consensus, s’est réfugiée dans une abstention prudente. Elle ne semble jamais avoir véritablement travaillé sérieusement sur ce traité pour y imprimer sa marque. Sa position intenable en Syrie a sans doute été pour quelque chose dans cette position d’attente, mais pourra-t-elle  tenir longtemps si elle veut continuer à peser sur le plan international ?

La position des pays arabes a souvent été considérée comme négative à cause de la position de l’Egypte qui masquait une forêt plus riche et complexe de pays. Car ce que l’on peut noter dans ce vote du 2 avril, c’est qu’une majorité des pays arabes, 12 sur 19, a voté en faveur du traité. Si l’Algérie[5] dès 2006 avait porté une vision positive du TCA, c’est ensuite le travail pédagogique et continu du Maroc qui a été déterminant.  La « résistance » aux pressions égyptiennes de pays comme la Jordanie, le Liban, les Comores et Djibouti et l’émergence de politiques nouvelles en Libye et Tunisie a été aussi importante. L’abstention de 7 pays, dont des producteurs comme l’Egypte ou des gros importateurs comme les pays du Golfe, signifie qu’un travail de conviction reste à faire afin de lever les doutes qu’a fait naître ce processus. Il sera intéressant de voir comment les grands pays  exportateurs comme l’Allemagne, la France, la Grande Bretagne et les Etats Unis s’appliquent dans cette tâche nécessaire. Car encore une fois il ne s’agit en aucun cas d’interdiction mais de régulation des transferts d’armes.

Enfin restent les pays d’Amérique latine de « l’alliance » autour de Cuba, le Venezuela, était absent pour le vote[6]. Avec l’Equateur et le Nicaragua ce sont pourtant des pays qui connaissent un taux d’homicide par habitant qui dépasse très   largement celui des pays européens. A part Cuba et la Bolivie, qui  ont une réglementation très stricte, les autres pays vont d’environ 6 meurtres avec des armes à feu pour 100 000 habitants pour le Nicaragua[7] à plus de 60 pour le Venezuela[8]. Les ONG se doivent de ramener ces pays vers un traité pourtant vital pour le respect des droits de l’Homme de leurs citoyens.

Le texte va maintenant être mis à disposition des Etats pour la signature dès juin prochain et les ONG vont avoir un travail important pour rappeler tous les votants à leur devoir de signature et de ratification[9]. Mais il s’agit aussi de continuer le travail de conviction auprès des abstentionnistes, il y a de vrai défis à relever pour donner au TCA une portée plus universelle.

Benoît Muracciole


[1] L’Iran se vit entouré d’ennemis, avec en plus des sanctions économiques très dur pour un programme de bombe atomique qui n’existe, la Syrie leur apparaît comme un de leurs derniers verrous.

[2] Voir : http://www.presstv.ir/detail/2013/03/28/295478/iran-backs-uns-arms-trade-treaty/ . Malheureusement la faiblesse de l’analyse géopolitique au sein d’une partie de Controlarms leur avait fait imprimer, le dernier jour de la conférence, cet article qui n’a pas eu l’heure de plaire aux délégués présents aux Nations unies.

[3] Pour mieux comprendre la position iranienne voir les Cahiers de l’Orient N°105 « Le cas Symptomatique de l’Iran » Benoît Muracciole.

[5] Elle a retrouvé sa place en votant en faveur du TCA, et sa cohérence aussi car sa loi nationale sur les exportations d’armes et encore plus stricte que le traité.

[6] Ce qui pourrait être interprété comme un assouplissement dans sa position ?

[9] Le texte rentrera en vigueur à la 50° ratification.





Derniers moments avant la remise du texte de Peter Woolcot du traité sur le commerce des armes

27 03 2013





Dernière semaine de négociations à l‘ONU pour le traité sur le commerce des armes classiques (TCA). Quel espoir pour demain ? Le traité si attendu verra-t-il le jour ?

25 07 2012

La table des Présidents… Photo Benoît Muracciole

 

Après trois semaines de négociations les Etats ont décidés de se réunir à nouveau ce samedi et dimanche après avoir déjà usé beaucoup d’énergie pour ce futur traité. Est  ce en vain que trois semaines d’intenses négociations ont déjà été « dépensées » ? L’équilibre des forces est largement disproportionné en faveur des Etats favorables à un TCA fort et efficace. Mais les opposants, appelés pudiquement les Etats sceptiques tentent toujours désespérément de  ralentir, voir bloquer ce processus. Après avoir évoqué avec un certain cynisme, à l ‘image de l’action des forces armées syriennes envers sa propre population, la situation palestinienne pour justifier leurs positions, ils arguent sur les références pourtant indispensables aux droits de l’homme ou aux droits internationales humanitaires (les fameuses conventions de Genève). Qui sont ils ces Etats qui semblent ne pas vouloir prendre en considération les besoins exprimés de plus en plus fortement par la plupart des pays africains et sud américains ? La Syrie bien sûr, rejointe par la Pakistan, de façon inattendue l’Indonésie, dans une moindre mesure l’Egypte et l’Algérie. Parfois aidé par Cuba, la Corée du Nord, l’Iran ou le Venezuela, cette coalition pour le moins hétéroclite n’a pas réussi à entamer la volonté de l’immense majorité des Etats d’obtenir ce traité pour la fin de la semaine prochaine.

 

 

Rappelons les points fondamentaux que nous souhaitons vivement voir expressément figurer dans ce texte fondamental :

 

Les objectifs : la régulation des transferts d’armes classiques et la lutte contre le trafic illicite[1],

Les critères :

L’obligation pour les Etats à ne pas transférer les armes classiques s’il y a un risque substantiel qu’elles soient utilisées ou facilitent les graves violations des droits de l’Homme – dont les droits économiques sociaux et culturels –  et du droit international humanitaire

Le champ d’application du traité doit porter sur toutes les armes classiques dont les  armes légères et de petits calibres, les munitions ainsi que les pièces détachées, les  composants, et enfin le matériel létal à usage du maintien de l’ordre. Bien que contestés, les transferts de technologie devraient aussi y figurer.

Les activités comme : Le transit, l’exportation, l’importation, le transbordement, les dons, les prêts…

Mais aussi le transport, l’assurance, le financement des transferts d’armes classiques.

 

Il ne reste donc qu’une grande semaine, et une course contre la montre s’ouvre contre les opposants qui en difficulté sur le nombre et les arguments, puisqu’ils ne sont qu’une quinzaine, voudraient faire parler les Etats qui gardent le silence.

 

Mais pour la première fois dans ce processus onusien, que nous suivons depuis 2006, un bloc conséquent de pays souhaitant un traité efficace est en train de se mettre en place. Composé de l’immense majorité des Etats du continent Africain, des Etats des Caraïbes, des Etats d’Amérique latine et d’Océanie, soutenue par des pays de l’Union Européenne, c’est une vague de fond qui pourrait bien faire peser la balance favorablement du bon coté.  Vendredi 20 juillet la déclaration du Malawi[2] au nom de tout ces Etats a eu son effet, le proche avenir nous dira s’il est positif.

 

Il s’agit maintenant pour tous de garder la tête froide, de ne pas succomber aux rumeurs les plus folles pour patiemment, à la façon du Président de la commission I le marocain Bouchaïb El Oumni, de reprendre inlassablement le fil directeur du futur traité, et de slalomer habilement entre les déclarations contradictoires. La dynamique existe qui positive, pourrait contenter la grande majorité des Etats. Le milieu de la semaine prochaine sera certainement le moment de faire les ultimes démarches, pressions sur les Etats pouvant évoluer favorablement sur ce traité. Pour les Etats Unis Barak Obama devra montrer au monde que son idée de multilatéralisme n’est pas  un vain mot et accepter enfin cette l’obligation sur les critère du droit international relatif aux droits de l’Homme et au droit international humanitaire et les munitions sans qui les armes ne sont que bois et acier. Quant à la Chine, qui a fait une déclaration positive et remarquée en ce sens, ainsi que la Russie, leur position dans ce processus sera un marqueur pour les 30 prochaines années dans le concert des Nations.
Enfin nous, Le Secours Catholique Caritas France et ASER, comptons sur la France qui porte une grande responsabilité dans les avancées positive du processus, pour tenir jusqu’au bout sur les valeurs de notre pays : L’obligation sur les droits de l’Homme et du droit international humanitaire comme ils l’ont toujours chèrement défendu ainsi que pour une liste des armes classiques exhaustive.

 

Didier Destremau   Secours catholique Caritas France : http://www.secours-catholique.org/

Benoît Muracciole Action Sécurité Ethique Républicaines

 


[1] Notamment l’Egypte, l’Iran et la Russie alors qu’ils est évident pour l’immense majorité que ces deux objectifs ont leur place

[2] Réunissant plus de 70 pays

 





L’Algérie et l’Egypte, Cuba, le Venezuela et l’Iran dans l’œil du cyclone dans les négociations du traité sur le commerce des armes (TCA)

7 07 2012

IPPNW les médecins pour la prévention contre la guerre nucléaire engagé pour un TCA fort et efficace. Photo Benoît Muracciole

Alors que l’immense majorité des États a affirmé sa volonté d’un traité fort et efficace avant la fin du mois, il apparaît maintenant que quelques États semblent y être opposés. Du moins se comportent ils comme s’ils y étaient opposés. Au regard de la situation de tels pays c’est encore plus étonnant. L’Algérie qui sort d’une guerre civile terrible qui a touché des millions de personnes et fait des centaines de milliers de morts. Une partie des  armes qui ont équipé les groupes armés étaient de fabrications égyptiennes et aucun accord régional n’existe pour contrôler de tels transferts irresponsables qui ont participé à de graves violations des droits de l’Homme, voir des crimes de guerre. Alors que l’Algérie fête les 50 années de son indépendance légitimement et chèrement gagnée, comment les autorités de ce pays peuvent jouer avec le droit et la sécurité de leurs propres citoyens plus longtemps ?

Quelle va être la crédibilité du plus grand pays du Continent Africain[1] qui se braque contre le plus important des traités du XXI° siècle ?

Les arguments du délégué algérien dénonçant un traité qui pourrait être un outil discriminatoire à cause de critères obligatoires sur les droits de l’Homme et du droit international humanitaire, ainsi que du droit pénal international ne tiennent pas. Car si un tel traité eut existé du temps de la guerre civile, c’est bien l’établissement  de ces critères obligatoires qui auraient pu donner une légitimité au gouvernement algérien d’interroger les pays producteurs des armes saisies, ainsi que de demander une aide de la communauté internationale de faire pression sur ces mêmes pays producteurs pour arrêter ces transferts. Le droit international est indivisible et effectif pour chaque individu vivant dans quelques pays que ce soit. Il est de la responsabilité des État de les faire appliquer. Il est terrible d’entendre le contraire de la part d’un pays qui a tant fait pour les libérations nationales des peuples et pour une reconnaissance universelle des droits de l’Homme.

Pour l’Iran, qui subit un embargo injuste qui appauvri chaque jour un peu plus la population et renforce l’emprise des Pasdarans[2] sur son économie la situation est plus difficile. L’Iran doit également pâtir d’une attitude quelques peu infantile de la part des États Unis dans leur refus, et ce depuis des années, de délivrer un visa d’entrée au représentant iranien pour la conférence des Nations unies[3].

Pourtant leur position dans cette conférence semble perdre le fil de la responsabilité. La volonté par exemple d’exclure les missiles, les armes légères et de petits calibres (ALPC ) et les munitions fait passer à nouveau ce pays pour peu sérieux. Alors que des millions de personnes comme nous l’avons déjà écris ici, vivent sous la menace de armes classiques, et spécialement des ALPC et des munitions. L’Iran peut profiter de ces négociations pour montrer qu’ils sont clairement engagés dans le droit international existant et rendre ainsi caduc les attaques parfois injustifiées de la communauté internationale à leur encontre.

Mais face à ces pays isolés, l’immense majorité répond pour un traité fort avec des objectifs définis dans la résolution de 2009 voté par 153 Etats lors de l’Assemblée Générale de l’ONU[4]. La France mais aussi l’Afrique du Sud, le Niger, la Namibie, le Nigeria, le Togo… ont fait des déclarations fortes pour préserver de tels objectifs et inclure dans le TCA les ALPC et les munitions. Que sont les ALPC sans les munitions, a répondu indirectement la Namibie aux Etats Unis – qui sont encore sur le refus de les intégrer dans le TCA – un morceau de bois et d’acier, ce sont les munitions qui en font une arme létale.

Benoît Muracciole New York


[1] Depuis la cessation du Soudan du sud, c’est maintenant l’Algérie qui est le pays grand en terme de superficie : 2 381 741 Km2.

[2] Le corps des gardiens de la révolution qui diffère de l’armée iranienne

[3] Alors que les Nations unies ne font pas parie des Etats Unis…