Garde à vue, une révolution Culturelle est indispensable

30 04 2011

Photo Benoît Muracciole

La garde à vue est ou plutôt était avec le contrôle d’identité la manifestation la plus marquante du pouvoir de contrainte de la police. Elle s’était banalisée depuis que la cour de cassation avait estimé en décembre 2000 que : « dès lors qu’une personne est tenue sous la contrainte à la disposition des services de police et qu’elle est privée de la liberté d’aller et de venir, elle doit être aussitôt placée en garde à vue et recevoir la notification de ses droits » Chaque année on comptait environ 350 000 mesures de garde à vue avant que l’on ne frôle les 900 000 en 2010.

La pratique de conserver une personne à disposition de la police se serait établie à partir de la loi du 10 vendémiaire An IV qui accordait aux représentants de l’ordre public le droit de retenir un individu jusqu’à ce qu’il ait apporté la preuve de son état-civil. Le décret du 20 mai 1903 concernant la gendarmerie nationale stipulait dans son article 307 : « En cas de flagrant délit, la conduite du délinquant devant le procureur de la République ne peut être différée au-delà de 24 heures. »

Bien que n’étant pas formellement spécifiée par le code d’instruction criminelle, la pratique de la garde à vue s’est banalisée et en quelque sorte légitimée. Il a fallu que le code de procédure pénale succède au code d’instruction criminelle abrogé en 1958 pour que la garde à vue devienne juridiquement et légalement une mesure de police judiciaire.

La procédure pénale française étant de philosophie inquisitoire, elle devait permettre de découvrir, de révéler la vérité, une vérité, et ce par presque tous les moyens. Les investigations étant secrètes, écrites et non contradictoires,  il était normal que dans la phase préparatoire du procès pénal, il n’y ait pas de place pour qui que ce soit, susceptible d’interférer entre le juge d’instruction, ou le procureur ou les policiers  et les personnes soupçonnées d’avoir commis une infraction pénale. Il faudra attendre la loi du 8 décembre 1897 pour que l’avocat puisse assister son client dans le cabinet du juge d’instruction, et il nous a fallu attendre 2011 pour qu’il puisse pénétrer dans la salle d’audition du commissariat et de la brigade de gendarmerie. Et encore cela s’est-il fait sous la double contrainte des juridictions européennes et de la Cour de cassation.

Pour augmenter sa capacité judiciaire, la police nationale française a donné aux gardiens de la paix la possibilité d’acquérir la qualité d’Officier de police judiciaire, et donc la faculté de prendre des mesures de garde à vue. Les parquets ont généreusement examiné les demandes d’habilitation sans se soucier de la qualité de l’encadrement, ce qui a aboutit à l’explosion aberrante du nombre de garde à vue.

Et pourtant, depuis déjà une bonne dizaine d’années on voyait les états d’esprit évoluer, les mœurs judiciaires intégrer l’idée d’un meilleur équilibre entre l’accusation, la poursuite, l’intérêt de la société et la défense des personnes mises en cause ou auteurs de crimes ou délits. La pratique française de la garde à vue ne correspondait pas aux exigences de la déclaration universelle des droits de l’Homme et la présomption d’innocence restait une référence purement formelle.

On ne peut véritablement qu’être éberlué par l’impréparation des policiers de police judiciaire à prendre en compte et à positiver la véritable révolution culturelle qui s’impose à eux. Ceux qui ont un peu d’expérience, les procéduriers professionnels des grands services de P.J. qui se sont déjà frottés à de grands maîtres du barreau sauront sans doute prendre le virage de la nouvelle procédure, mais tous les jeunes O.P.J. sans expérience d’enquête, sans véritable encadrement judiciaire vont avoir bien du mal à changer totalement de pratique. Comment les grands ministres de l’intérieur et leurs directeurs ont-ils pu jouer le jeu de l’immobilisme alors que l’imminence de la réforme était une évidence ?

La sécurité de toutes les personnes résidant sur le territoire national implique que les procédures soient bien faites dans les règles. Il n’y a qu’un code de procédure pénale, c’est le même pour le procureur, l’avocat ou le policier, et il doit être respecté par tous les acteurs du procès pénal, encore faut-il qu’ils soient tous également préparés.

Georges Guillermou, aser Action Sécurité Éthique Républicaines

Benoît Muracciole : aser Action Sécurité Éthique Républicaines

Contact presse : Leila Le Boucher Bouache

Tel :  +33 6 62 07 66 77





Les armes US dans les rues de Monterrey au Mexique (Épisode II)

25 04 2011

La police dans la nuit de Monterrey. Photo Benoît Muracciole

J’ai été frappé, durant les 10 jours passés au Mexique, à l’invitation du festival Ambulante du film documentaire, par l’engagement et l’intérêt des spectateurs sur la thématique des armes. Chaque fois, après la projection du film de Paul Moreira et David André[1], nous avons eu de longues discussions avec la salle. Elles ont été riches de la connaissance des participants, surtout des jeunes, sur la question du trafic d’armes, et nous avons parfois continué devant le cinéma ou dans un  café voisin. Mais comme nous l’écrivions sur ce blog, ils ont de quoi être en alerte sur la question.

La situation à Monterrey, située dans le Nord Est du Mexique[2] y est impressionnante en termes de « violence armée ». En trois ans, elle est passée du statut de ville industrielle paisible à celui d’une de villes les plus meurtrières du Mexique. Un chauffeur de taxi me disait qu’il était fréquent de compter près de 30 assassinats par jour, ce qui donnerait environ 9 000 meurtres par an. Un chiffre peu probable, Ciudad de Juarez (1 300 000 habitants), l’une des villes les plus violentes,  à peu près de la taille que Monterrey et sa banlieue, a connu le chiffre record de plus de 2 600 meurtres pour 2009.  Mais parfois « la perception est la réalité » et ce n’est pas l’arrestation, la semaine dernière, de Martín Omar Estrada Luna[3], possible chef du cartel de « los Zetas », qui changera beaucoup le sentiment d’une violence sans fin ancrée chez beaucoup de Mexicains. Car la courbe des crimes, que le pays connaît depuis 2007, est en croissance exponentielle. Elle retrouve aujourd’hui le taux de meurtres des années 1990 qui était d’environ 20 homicides pour 100 000 habitants. Mais ce chiffre est largement dépassé dans les États du Nord du pays à proximité de la frontière étasunienne[4]. Cela s’explique par la volonté du gouvernement de Felipe Calderon d’engager une lutte sans merci contre les cartels de la drogue. Pour cela, un certain nombre de mesures ont été prises par le gouvernement mexicain, certaines intéressantes, d’autres moins.

Dans l’État de Nuevo Leon par exemple[5], le Lt Gouverneur a déclaré que le salaire des policiers passera de 600 $ à 1100 $[6]. Cette augmentation est importante car elle est le signe patent de l’intérêt que les autorités d’un pays porte au métier de policier, à la fonction du maintien de l’ordre et du respect de la loi. Car une bonne police, respectueuse des droits humains, renforce également la cohésion de la société du pays dans laquelle elle officie. C’est ce qui est dit dans le préambule des principes des Nations Unies sur l’usage de la force et des armes à feu qui dispose: « qu’une menace à la vie et à la sécurité des responsables de l’application des lois doit être tenue pour une menace à la stabilité de la société dans son ensemble ». Elle assure de fait une indépendance financière aux membres de la Police ce qui permet une plus grande exigence[7] de l’État envers eux et les  protège  un peu plus efficacement contre la tentation de passer du coté des cartels. Car l’activité des policiers corrompus peut aller de la vente d’uniformes et d’essence jusqu’au racket, à la vente de renseignements, d’armes, voir à  la participation directe et indirecte des opération des cartels.

Une autre mesure intéressante me semble être celle concernant l’action juridique. Il y a quelques jours, le gouvernement Mexicain a déclaré avoir engagé un cabinet d’avocats étasuniens afin de poursuivre les producteurs d’armes, ainsi que les vendeurs, dont les fusils et autres armes à feu ont alimenté le trafic au Mexique. Elle s’inspire de la logique éprouvée des « Class Action » des consommateurs étasuniens et canadiens contre les entreprises qui contrevenaient à leurs devoirs. Il y a là un espace à creuser qui, malgré les moyens financiers considérables des producteurs d’armes[8], peut contraindre les États Unis à un contrôle responsable de la vente des armes et des munitions. L’administration de W Bush avait d’ailleurs bien compris le danger des « Class Action »  en faisant voter une loi en 2001 pour protéger les producteurs d’armes de toutes poursuites judiciaires. Mais la loi est un mouvement éternel qui se redessine au gré des nouveaux rapports de force et la violence que connaît aujourd’hui le nord du Mexique en est un considérable. Enfin cela peut aussi stimuler le gouvernement étasunien à reconsidérer son objection à intégrer les munitions des armes légères et de petits calibres (ALPC) dans la liste des armes du futur traité international sur le commerce des armes.

Par contre dans les « moins bonnes mesures » prise par Felipe Calderon concerne l’envoie d’environ 50 000 militaires, pour faire la guerre aux cartels. L’idée de base était que l’armée est l’organe sain qui a su résister à la corruption et qu’elle saura répondre efficacement au niveau de violence des cartels. Malheureusement la logique militaire est au maintien de l’ordre ce que la musique militaire est à la musique[9]. Et très vite cette vision simpliste, de lutte contre les cartels, va se heurter à la réalité d’une situation, qui elle, ne l’est pas. En cela l’histoire de Carlos Bibiano Villa Castillo, général à la retraite et petit neveu de Pancho Villa, est édifiante. La méthode de ce militaire ne s’embarrasse pas des droits humains. Il a déclaré, dans le quotidien Mexicain La Jornada, « quand je vois un Zeta ou un Capo, je le tue… » et se vante d’avoir eu la peau de plus de 200 narcos. Pour lui pas de référence au huitième Congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants[10], et qui précise dans son quatrième article que : « Les responsables de l’application des lois, dans l’accomplissement de leurs fonctions, auront recours autant que possible à des moyens non violents avant de faire usage de la force ou d’armes à feu. Ils ne peuvent faire usage de la force ou d’armes à feu que si les autres moyens restent sans effet ou ne permettent pas d’escompter le résultat désiré. »

Mais cette posture de « justicier », violant gravement les droits humains, n’a pas représenté un plus dans la sécurité de la population mexicaine, bien au contraire. Le nombre de crimes à même dramatiquement augmenté dans la région. En 2007 les statistiques donnaient le chiffre de 18 crimes, en 2010 il y en a eu plus de 381[11], et le premier trimestre de 2011 nous en sommes déjà à plus de 118[12].

Carlos Bibiano Villa Castillo n’a pas non plus été sanctionné. Il a quitté Torréon[13] bénéficiant d’une promotion de l’État de Quintana Roo dont il a été nommé secrétaire de la sécurité publique. Pourtant là encore, selon l’article premier du huitième congrès des Nations unies, la responsabilité du gouvernement mexicain est engagée : « Les pouvoirs publics et les autorités de police adopteront et appliqueront des réglementations sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu contre les personnes par les responsables de l’application des lois. En élaborant ces réglementations, les gouvernements et les services de répression garderont constamment à l’examen les questions d’éthique liées au recours à la force et à l’utilisation des armes à feu ».

Il n’y aura pas de lutte efficace contre le crime organisé sans l’appui de la population et il faut pour cela qu’elle puisse avoir confiance dans l’engagement de l’Etat à faire respecter leurs droits devant la déclaration universelle des droits de l’homme.

Benoît Muracciole Action Sécurité Éthique Républicaine


[1] , Armes, trafics et raison d’Etat

[2] A environ  150 km de la frontière étasunienne

[3] Son surnom est « el Kilo », et « son » cartel s’est installé il y a peu à Monterrey.

[4] Depuis le début avril, dans l’État voisin de Tamaulipas à San Fernando, 172 nouveaux corps ont été retrouvés dans 34 fosses différentes

[5] Dont la capitale est Monterrey,

[6] Le salaire d’un policier au Mexique se situe en général entre 285$ et 400$

[7] Notamment en matière de consommation de stupéfiant avec des contrôles plus stricts

[8] Notamment avec le soutien de la National Rifle Association (NRA)

[9] De Georges Clémenceau

[10] Qui s’est tenu à La Havane du 27 août au 7 septembre 1990

[11] Dont le massacre de 17 personnes, dans une fête, en août 2010

[12] Ce qui reviens à 2 crimes tous les trois jours.

[13] État de Coahuila situé au nord du Mexique à la frontière du Texas





LES DEPUTES FRANÇAIS DOIVENT VOTER POUR UN CONTROLE PLUS RESPONSABLE DES VENTES D’ARMES

12 04 2011

Aujourd’hui mardi 12 avril le projet de loi « relatif au contrôle des importations et des exportations de matériels de guerre et de matériels assimilés, à la simplification des transferts des produits liés à la défense dans l’Union européenne et aux marchés de défense et de sécurité », doit être voté à l’Assemblée Nationale. A la suite de la dynamique de travail menée par le gouvernement français au titre du projet de traité international sur le commerce des armes, aujourd’hui en négociation à l’ONU, les membres du Parlement se doivent d’adopter une loi exemplaire.

« La nouvelle loi doit assurer une évaluation rigoureuse du risque substantiel d’usage des armes avant autorisation d’exportation. Elle doit être faite au cas par cas, pour prévenir de graves violations des droits humains et du droit international humanitaire » affirme Juliette Gayet experte juridique auprès d’Action Sécurité Éthique Républicaines (ASER).

Ce nouveau texte de loi permettra ainsi de mieux anticiper les exportations vers des pays dont le contexte politique laisse présager une utilisation répressive ou pire des matériels de guerre et de matériels assimilés,  et ce en imposant un meilleur contrôle des ventes d’armes car : « Il n’est pas admissible que les armes françaises tombent dans les mains de gouvernements irresponsables comme ce fut parfois le cas dans le passé, notamment avec le Bahreïn, l’Egypte, la Libye, la Tunisie, la Côte d’Ivoire etc. La loi que les députés vont voter doit anticiper et stopper de telles dérives » déclare Benoît Muracciole, vice président d’Action Sécurité Éthique Républicaines (ASER).

Depuis l’adoption en 2008 de la Position Commune de l‘Union Européenne sur les exportations d’armes, la France est de facto juridiquement engagée. Elle se doit de respecter avec rigueur, les 8 critères de la Position Commune qui encadrent les décisions d’exportations par la délivrance de licence individuelle d’exportation.

 

 

Leila Le Boucher Bouache
Chargée des relations médias
Tél : +33 6 62 07 66 77

 





Les armes US dans les rues de Monterrey au Mexique (Episode 1)

11 04 2011

Message d'interdiction de port d'armes dans le métro a Mexico City. Photo Benoît Muracciole

Je suis au Mexique à Monterrey, à l’invitation du Ambulante Film Festival[1], pour présenter le film de David André et Paul Moreira « Armes, trafic et raisons d’État ». Un festival qui se déroule pendant trois mois dans  près de 15 villes du Mexique et qui traite, par le biais notamment du documentaire, des questions sociales et culturelles du moment. Si j’ai animé de nombreux débats après la projection de « Armes, trafic et raisons d’État », c’est la première fois que je le commente dans une situation de violence armée plus que préoccupante.

Cette semaine soixante douze personnes ont été retrouvées mortes, assassinées dans le nord du Mexique.

Combien en faut il encore pour faire bouger efficacement les États Unis ?

Quelques chiffres sur la situation de la violence des cartels au Mexique :

En quatre ans  la « guerre de la drogue » a fait plus de 30 000 victimes auprès de la population mexicaine, ce qui est quand même considérable pour un pays qui ne produit pas d’armes.

Une étude du Centre Brady « to prevent gun violence[2] » montre qu’en 2010 les USA ont perdu la trace de 21 041 armes à feu, dont des fusils d’assaut AK47 et AR 15[3].

AR 15 fusil d'assaut, notamment utilisé par les narco-trafiquants Mexicains

Selon les estimations les plus crédibles, entre 80 et 90% des armes utilisées au Mexique par les cartels viennent aujourd’hui des États Unis.

Douze des plus importantes armureries des USA se trouvent au Texas (9), en Arizona (2) et en Californie (1) et il y a plus de 3 000 au Texas même.

Plus de 115 armes à feu ont été saisies par la police et les militaires au Mexique ces deux dernières années, elles venaient de quatre magasins de la chaine « Carter’s country », situés dans les environs d’Houston au Texas.

Il y a 3 800 armureries au Texas dont 300 à Houston. « De quoi faire le tour de la ville pendant presque un mois en achetant des armes sans se trouver dans le même magasin[4] ».

Mais que fait la Police ?

En 2006, la réaction des autorités étasuniennes a été à la hauteur du pays, spectaculaire, avec un budget de 60 millions de $. Le « Project Gunrunner [5]» a mobilisé de plus de 220 agents ainsi que 165 inspecteurs qui ont contrôlé les armuriers. L’idée étant de tracer les armes vendues à partir du territoire des États Unis mais sans grand succès. Sur les plus de 70 000 armes disparues des registres en quatre ans, seul plus de 400 ont été confisquées, et ce ne sont pas les plus de 20 500 agents des douanes et de la protection des frontières[6] en place l’année passée qui ont augmenté les saisies.

Car vous aurez beau mettre un million de personnes pour la surveillance des frontières, si la faiblesse de la loi ne permet pas de poursuivre efficacement les revendeurs, les armes continueront de nourrir la violence au Mexique ou dans d’autres pays. Elle augmente même parfois le sécurité des honnêtes citoyens qui sont parfois victimes de l’emploi excessif de la force. C’est ce que notent de nombreux officiers d’ATF qui se plaignent de ne pouvoir avoir les moyens juridique de poursuivre les trafiquants.

En cela l’exemple de George Iknadosian est édifiant. Propriétaire de l’armurerie «  X-Caliber » à Phoenix en Arizona. Il avait vendu 710 armes, connues pour être appréciées des cartels mexicains, dont des Kalachnikov et des SKS-styles rifles. Au moins 86 de ces armes, entre 2005 et 2008, avaient été identifiées par les agents de l’ATF comme étant impliquées dans une violation de la loi aux USA ou au Mexique. Pourtant le procureur de Phoenix a refusé de le poursuivre n’ayant pas les ressources financières pour le faire.  Les agents se sont donc tournés vers le procureur de l’Arizona, mais ce dernier, malgré un travail d’une année en lien étroit avec la police de Phoenix,  s’est cassé les dents. Le juge Robert Gottsfield en charge de cette affaire l’a rejeté avant qu’elle n’aille devant un jury et  ce bon citoyen étasunien est reparti libre comme l’air…

SKS rifle fusil d'assaut

Cette faiblesse de la loi[7] dans le contrôle des transferts d’armes aux États unis est la raison majeure de cette absence d’efficacité dans la lutte contre les cartels du Mexique. Il y en a certes d’autres, notamment de types sociales, économiques et culturelles, mais ce que dit le projet de traité international sur le commerce des armes est ici bien prégnant : « Sans un instrument juridique international régulant le transfert des armes, il n’y aura pas de baisse significative des crimes et autres violations des droits humains ».

Benoît Muracciole

Action Sécurité Éthique Républicaines (ASER)


[3] voir photo début blog

[4] Déclaration de l’agent spécial d’ATF J. Dewey Webb http://www.washingtonpost.com/wp-srv/special/nation/guns/

[6] Ils étaient 10 000 en 2004

[7] Le directeur exécutif de la NRA, Chris W. Cox, déclarait qu’il trouvait que c’était un « triste fantasme » de penser que la loi étasunienne était à l’origine de l’armement des cartels mexicains…





Du respect droits humains et des principes de l’ONU sur l’usage de la force en Côte d’Ivoire

4 04 2011

l'absence de l'ONU sur la protection des droits humains en Côte d'Ivoire

Les forces républicaines fidèles à Alassane Ouattara sont entrées dans Abidjan vendredi 1er avril 2011. Dans la logique annoncée par la communauté internationale l’information est plutôt bonne. Le Président élu de la Côte d’Ivoire va enfin pouvoir s’installer dans le palais  présidentiel et le droit des élections va être respecté. Mais le problème est que, dans ce conflit qui dure ouvertement depuis 9 longues années, la vérité n’est pas aussi simple. Elle mériterait sans doute de regarder un peu plus du coté du respect des droits humains.

Et là il y a une responsabilité des deux camps devant l’article premier de la Charte des Nations unies qui attend des gouvernements de développer et encourager: « … le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales pour tous, sans distinctions de race, ce sexe, de langue ou de religion; »

Depuis le début du conflit les forces de part et d’autres ont été responsables de graves violations des droits de la personne sans qu’il n’y ai eu de tentative d’en traduire les responsables en justice[1]. Le langage de la haine a été plusieurs fois entendu dans les médias sous contrôle de Laurent Gbagbo. La question de l’ivoirité, notamment, a été posée de façon aussi dangereuse que possible.

Ces derniers jours la violence contre les civils a de nouveau repris à grande échelle, les témoignages affluents pour dire que les forces des deux camps sont responsables de la mort de plus de 800 personnes à Duékoué[2]. Des charniers on été découvert à Toulepleu, Blolequin et Guiglo dans l’ouest du pays et cette fois se sont les forces restées fidèles à Laurent Gbagbo qui sont désignées.

Mais que fait l’ONU en Côte d’Ivoire ?

D’abord le positif ; l’embargo sur les armes commence à porter ses fruits. La Biélorussie, qui avait accepté de vendre du matériel de guerre au camp de Laurent Gbagbo, a du reculer sous la pression de l’ONU[3]. Le rapport des experts  dénonçant une violation de l’embargo a eu de l’effet et l’avion chargé d’armes biélorusses a fait demi-tour. L’intermédiaire Robert Montoya[4], qui en avait organisé la livraison, a été mis en échec, prouvant là que des mesures prises concernant les transferts d’armes pouvaient avoir un effet positif réel. Moins d’armes ne signifient pas un arrêt immédiat de la violence mais au moins un net recul dans son ampleur.

Par contre le négatif reste les déclarations des gouvernements[5]. Ceux ci continuent d’appeler au départ de Laurent Gbagbo et à la retenue dans l’usage de la force à l’encontre des civils, mais aucun d’entre eux n’a ordonné à l’ONUCI de respecter le chapitre VII[6] de son intervention pour protéger ces mêmes civils. Or la résolution 1975 du Conseil de sécurité de l’ONU du 31 mars 2011 rappelle : « tout en soulignant qu’il l’a assurée de son plein appui à cet égard, qu’il a autorisé l’ONUCI, dans le cadre de l’exécution impartiale de son mandat, à utiliser tous les moyens nécessaires pour s’acquitter de la tâche qui lui incombe de protéger les civils menacés d’actes de violence physique imminente, dans la limite de ses capacités et dans ses zones de déploiement, y compris pour empêcher l’utilisation d’armes lourdes contre la population civile, et prie le Secrétaire général de le tenir informé de manière urgente des mesures prises et des efforts faits à cet égard; »

Et c’est là ou la force de la communauté internationale s’épuise car elle ne sait pas répondre efficacement à cette nécessité de protection des droits des personnes. Non pas que l’exercice soit aisé dans le temps de la crise, mais parce qu’elle ne se donne pas les moyens de prévenir celles ci. Les budgets de désarmement, démobilisation et de réinsertion (DDR) subit toujours de graves insuffisances financières.  L’encadrement strict des forces armées et de polices en souffre également, en terme de solde[7], mais aussi en terme de formation sur les principes de l’ONU sur l’usage de la force et des armes à feu[8]. Enfin la question des moyens de la justice pour assurer que les responsables de toutes violations des droits de la personne et du droit international humanitaire seront traduit en justice.

C’est ce que doit déclarer le Président Alassane Ouattara s’il veut sauver son pays d’un plus grand chaos et surtout avancer dans la culture de la Paix. Il doit s’engager publiquement à poursuivre toutes les personnes qui sont susceptibles d’avoir commis des violations des droits humains (VDH) et d’ouvrir une enquête indépendante et impartiale immédiatement. C’est presque ce que Guillaume Soros a déclaré, en affirmant sur TV5 qu’ils lutteront contre toute impunité pour les responsables de VDH. Nous suivrons la situation avec attention pour savoir si ces déclarations ont été suivies de faits.

Je ne suis volontairement pas rentré dans une explication ethnique du conflit parce qu’elle représente depuis des années le prisme principal par lequel les pays du nord légitiment les graves violations des droits de l’homme sur le continent Africain. Les ethnies existent, comme partout, et sont instrumentalisées, comme partout. Elles ont simplement d’autres appellations comme « identité régionale », « communauté d’origine étrangères» ou «  émigré deuxième génération».

Benoît Muracciole

Action Sécurité Éthique Républicaines (ASER)


[1] Voir notamment les rapports d’Amnesty International

[2] Caritas, ACF ainsi que le CICR ont témoigné dans ce sens en désignant, pour le moment, les deux camps comme responsables.

[3] Voir le rapport des experts de l’ONU sur la Côte d’Ivoire

[4] voir blog précédent

[5] L’union Européenne, les États Unis et la France. Je reste convaincu que la France est encore trop impliqué, dans son histoire de colonisateur avec la Côte d’Ivoire, pour  être perçue comme un intervenant impartial, elle doit se retirer de ce conflit et travailler au sein de l’UE.

[6] Le chapitre VII des Nations unies donne une obligation de protéger les droits des personnes

[7] Des militaires et des policiers qui ne peuvent subvenir à leurs besoins rackettent, pillent, en bref se payent sur les populations civiles.

[8] Voir dans la rubrique rapport du blog