Nouveau rapport au Parlement sur les exportations d’armements de la France en 2011

22 11 2012

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Paris, le 22 novembre 2012

 

Ventes d’armes de la France : des progrès, mais peut mieux faire

 

 

Aser [1], membre du RAIAL[2], souligne l’effort de transparence réalisé dans le rapport 2012 sur les exportations d’armements de la France, publié ce matin par le ministère de la Défense. Cependant, nos ONG restent mobilisées quant à la destination de matériels de guerre en direction de nombreux pays identifiés comme responsables de graves violations des droits humains et du droit international humanitaire, comme le Barheïn, la République Démocratique du Congo, Israël, ou encore le Tchad.

 

L’actualité, notamment à Gaza, en République Démocratique du Congo et en Syrie, devrait inciter le gouvernement français à davantage de prudence dans l’évaluation des risques d’usage des armes classiques exportées depuis notre pays.

 

Aser salut la présentation du rapport 2012 par le  ministre de la Défense Jean Yves le Drian aux parlementaires français. C’est la première fois que les parlementaires sont ainsi sollicités dans un débat pour la sortie de ce rapport, ce qui correspond à une demande ancienne des ONG. Le Parlement doit enfin jouer un rôle premier dans les orientations des exportations de la France afin que celles-ci soient en conformité avec la Position Commune de l’Union Européenne. Nos ONG saluent également la volonté du ministre d’avancer dans la transparence tant dans la description des matériels exportés que dans le temps de leur publication.

 

Aser accueille très favorablement la volonté du ministre de la défense ainsi que des Présidentes des commissions des affaires étrangères et de la défense de travailler en concertation avec les ONG.

Enfin, Aser reconnait le travail positif effectué par la France en faveur de l’adoption du Traité international sur le commerce des armes (TCA) [3], lequel permettrait de prévenir les transferts d’armes qui alimentent les atteintes graves aux droits de l’Homme et au droit interantional humanitaire ainsi que les conflits et la pauvreté.

 

 

Contacts :

Agnès de Monpezat : 06 47 10 40 71

Benoît Muracciole : 06 84 10 62 18


[1] ASER, Action Sécurité Ethique Républicaines, est une association qui lutte pour le respect des droits de l’homme dans les transferts d’armes et dans l’exercice du maintien de l’ordre par les forces de police.

[2] Réseau d’Action International  sur les Armes légères

[3] Ce traité est actuellement en cours de négociation au sein de l’Assemblée Générale des Nations unies.





Quel positionnement des ONG pour le futur traité sur le commerce des armes (TCA) ?

19 11 2012

Le vote du 7 novembre dernier[1] a révélé de grandes différences entre les ONG dans la compréhension du processus du TCA et  de son utilité. Cet écart vient sans doute d’un ancrage différent dans l’histoire  de leur engagement en faveur du TCA. Depuis le début des années 1990, des ONG comme Amnesty International, la fondation Arias… ont pensé ce traité comme un instrument de régulation des transferts d’armes classiques juridiquement contraignant. Un traité qui vient à la fois d’une étude minutieuse de l’utilisation des armes dans les violations des droits de l’Homme (DH) et du doit international humanitaire (DIH) sur le terrain et des réflexions et concertations avec des juristes engagés sur ces questions. Puis en 1997, c’est le traité d’Ottawa sur les mines anti personnel  a eu une incidence positive pour ce qui est de la mobilisation des ONG dans ce domaine. Mais le traité d’Ottawa et plus tard d’Oslo ont été des références de mobilisations populaires il n’ont jamais servi de modèle en terme de plaidoyer en direction des Etats et encore moins pour ce qui est du contrôle des transferts d’armes.

La première raison est que les relations internationales ont considérablement changé depuis 1997 avec notamment « l’hégémonie » des Etats Unis qui a fait long feu, les révolutions arabes en devenir et la montée en puissance des Etats émergeants / émergés qui se consolide. La deuxième raison est que la question du contrôle des transferts d’armes classiques est complexe[2]. La décision souveraine des Etats d’autoriser ou de refuser une exportation suscitera parfois des discussions entre les Etats parties quant à  l’interprétation de critères, notamment droits de l’Homme[3] et droit international humanitaire, auquel il est difficile de répondre en cochant des cases. La troisième enfin est que pour aspirer à un minimum d’autorité et d’efficacité, le futur TCA se doit de convaincre les principaux exportateurs d’armes classiques de l’intégrer[4]. On le voit bien dans le cas de la Syrie – ou la Russie et l’Iran ont livré des armes au régime de Bashar El Assad –  d’Israël – ou cette fois ce sont les Etats Unis qui sont les principaux pourvoyeurs – et enfin de la RDC. La force du futur TCA sera aussi dans la constitution du groupe de pays qui en sera parti.

La situation en République Démocratique du Congo (RDC) en est un terrible exemple aujourd’hui encore. Des troupes rassemblées autour du M23 sont responsables de graves violations des DH et du DIH. Un rapport de l’ONU[5] pointe le Rwanda et l’Ouganda, en violation de l’embargo de l’ONU sur les armes en direction des entités non gouvernementales en RDC[6], comme étant les principaux pourvoyeurs de cette milice. De l’autre coté les  Forces armées de la République Démocratique du Congo (FARDC) reçoivent des armes pour combattre le M23 , ce que les Etats reconnaissent comme une action de légitime défense[7]. Seulement des rapports d’ONG[8] alertent les autorités onusiennes sur les graves violations du DH et DIH par ces mêmes FARDC.

Il y a donc plusieurs questions auquel l’Etat partie devra répondre :

Comment dans une situation semblable prendre la bonne décision afin de ne pas aggraver la situation des populations civiles dans les zones concernées.  Je rappelle que le premier engagement devant de la  Charte des Nations unies[9] est de maintenir la paix et la sécurité internationale… et développer et encourager les droits de l’Homme ?

Comment s’assurer que les soldats armés respecteront le droit international dans leurs interventions  ?

Comment s’assurer que le mouvement rebelle M23 sera contenu ?

Enfin comment s’assurer que les membres du M23 et des FARDC responsables de graves violations des DH et du DIH seront jugés ?
C’est à partir de situations de conflits comme la RDC que des ONG – dont ASER  Amnesty International, Caritas France, World Council Churches ainsi que de nombreux membres du RAIAL[10] avec les co auteurs de la résolution L11[11]– ont convaincu les Etats pour parrainer et voter cette résolution. Car en plus de reconnaître le texte du 26 juillet[12] comme la base d’une négociation finale[13], la résolution avec sa règle du consensus garde tous les Etats à son bord. Il sera temps cette fois, pour l’immense majorité des Etats, de passer par l’Assemblée Générale pour voter le texte au cas où le dernier jour de la conférence quelques Etats bloqueraient encore. Mais déjà le vote du 7 novembre des 153 Etats a donné le ton et le rythme pour le mois de mars prochain.  C’est l’aboutissement d’un texte qui donnera une réponse politique forte aux Etats qui dans les Grands Lacs, à Gaza ou en Syrie, penseraient qu’il sont exempt du respect du droit international.

Il reste donc un travail important à faire sur le texte pour s’assurer de sa tenue juridique, et il va s’agir pour beaucoup d’ONG de mettre de coté cette obsession médiatique et « agitatoire » pour gagner enfin en crédibilité[14]. Etre crédible c’est être prêt pour faire face aux nombreux défis qui seront posés lors de la conférence finale. Il s’agira notamment d’envisager et de comprendre ce qui est réaliste de ce qui ne l’est pas dans les changements attendus du texte, bref de ne pas reproduire les erreurs de juillet et d’octobre dernier. Il y a le temps pour cela et  le reste n’est que mauvaise littérature.

Benoît Muracciole


[2] Le traité d’Ottawa est un traité d’interdiction, la question qu’il pose est binaire : «  êtes vous pour l’interdiction de la production de mines anti personnelles, si vous êtes pour, vous ratifiez les traité».

[3] Dont bien sûr les droits économiques sociaux et culturels.

[4] La Chine, les Etats Unis, L’inde, l’Iran, la Russie notamment ne sont pas partis au traité d’Ottawa.

[5] Voir http://www.rfi.fr/afrique/20121020-m23-experts-onu-rwanda-ouganda-rebelles-rutshuru-ouganda-fardc-louise-mushikiwabo  : « Le gouvernement du Rwanda continue de violer l’embargo sur les armes en apportant un soutien militaire direct aux rebelles du M23, en facilitant leur recrutement, en encourageant et facilitant les désertions au sein des FARDC, ainsi qu’en fournissant des armes, des munitions, des renseignements et des conseils politiques ».

[7] Article 51 de la charte des Nations unies http://www.un.org/fr/documents/charter/chap7.shtml

[10] Réseau d’Action International sur les Armes Légères : http://fr.iansa.org/home

[13] Les 9 jours de négociations impliquent des changements d’ordre nécessaires et réalisables

[14] Et enlever de la tête des Etats sceptiques qu’ils ont une chance de faire capoter la conférence finale.





Réflexions après le vote de la résolution A/C.1/67/L.11 de l’ONU pour le traité sur le commerce des armes classiques .

14 11 2012

ONU vue sur l’Hudson. Photo Benoît Muracciole

Quelques jours après le vote de 157 pays en faveur de la résolution[1] ouvrant des négociations finales pour un traité sur le commerce des armes (TCA), il est intéressant de regarder avec attention les nouveaux équilibres qui se dessinent avant la conférence de mars 2013.

La Chine : C’est d’abord la première bonne nouvelle. Elle s’est toujours cachée pendant les premières années de discussion et elle n’avait osé, à la fin des discussions du groupe d’experts gouvernementaux en 2008, qu’une timide déclaration : «Pour un possible TCA». L’engagement des trois membres du Conseil de Sécurité[2] n’est pas étranger à ce mouvement, mais c’est incontestablement l’Afrique dans son ensemble, et non pas l’Union Africaine toujours bloquée par l’Egypte, qui a convaincu les chinois de leur intérêt à s’engager pour un TCA. Parce que l’immense majorité des Etats africains, dépassant une bonne fois pour toute de vieux  clivages politiques et linguistiques, a su construire patiemment un rapport de force[3]afin de convaincre positivement ce grand Etat qu’est la Chine. Le signe avant coureur de ce changement était, en juillet dernier, la déclaration du délégué chinois demandant l’intégration du droit international, dont les droits de l’Homme et le droit international humanitaire, dans les critères.

A part son blocage compréhensible sur les accords régionaux[4], elle s’est engagée dans une véritable révolution culturelle…

L’Inde : C’est le troisième pays qui depuis 2006 s’était abstenu avec la Chine et la Russie, et qui a lui aussi basculé dans le camp des soutiens. C’est un mouvement que je le pensais voir faire dès 2009 mais il semble que la décision était encore trop controversée au sein même du gouvernement indien. Est ce là aussi la position des grands  pays exportateurs, des pays africains, ou la montée en puissance d’une société civile indienne sur les questions de corruption, il est encore trop tôt pour le dire mais le résultat est là.

Le Pakistan : C’est un peu plus que le troisième pays qui depuis 2006 s’était abstenu avec la Chine et la Russie, et qui a lui aussi basculé dans le camp des soutiens. Car le Pakistan a été dans les premières années des discussions au sein de l’ONU un adversaire loquace. Par l’intermédiaire d’un officier pakistanais de haut rang j’avais eu quelques indications sur une analyse plus pragmatique du traité par les politiques et militaires pakistanais et la position de la Chine a sans doute aidé ce vote. Cependant je n’attendais pas un changement si rapide de la part de ce pays au point de ne pas avoir vu ce vote avant qu’on ne me le signal.

Les Etats Unis : Nous avions compris que ces derniers avaient conditionné leur accord vis à vis du texte du 26 juillet sur le résultat des élections présidentielles. La rapide validation de la victoire d’Obama a permis à la délégation étasunienne de commencer à réparer la bévue de juillet en votant pour la résolution. Gageons que ce pays pourra faire évoluer raisonnablement et positivement le texte du 26 juillet. Leur position sur les munitions ayant évolué, il n’est pas interdit de les voir évoluer encore un peu plus d’ici le 28 mars, mais là encore la clé de ce mouvement ne pourra venir que de l’Afrique soutenue bien entendu par l’ensemble des autres Etats.

La Russie : Ce pays n’a toujours pas réussi à se rassurer quant à ce processus de régulation. Pour ceux qui ont assisté ou participé à des négociations, ils savent combien la connaissance de la culture de « l’âme Russe » est importante pour comprendre et accompagner ce temps d’indécision. Comme chez les grands auteurs de Dostoïevski à Tchekhov, en passant par Gontcharov et Gogol ou l’immense Tolstoï, les chemins de la décision ne peuvent être rapides et simples, mais il y a de l’espace à un positionnement favorable à venir. D’abord parce qu’il pourrait être difficile pour ce pays de rester en dehors des 4 autres membres du Conseil de Sécurité; ensuite parce que la configuration de ce vote exprime un nouvel équilibre des pouvoirs, dont la Russie à terme pourrait souffrir. Enfin parce que la déclaration du major général d’aviation Syrien Mohamed Fares[5], réfugié à Doha au Qatar, laisse penser que si le pouvoir de Bachar el Assad  manque de bombes et de pièces détachées pour son aviation, cela pourrait vouloir dire que les russes ont cessé, voir refusé de leur en livrer. Petit signe allant dans le sens d’une compréhension de ce que le TCA demande, une responsabilité des Etats quant à l’usage des armes.

L’Asie reste un continent aux engagements divers, mais dont il est raisonnable d’espérer de bonnes surprises pour mars.

Enfin l’Afrique bien sûr, l’Amérique latine, les Caraïbes, l’Océanie ont presque fait un bloc unanime dans le vote et quasi unanime dans le parrainage. Cuba toujours sur la défensive avec le Venezuela, dont le délégué m’avait pourtant assuré que son pays voterait en faveur de la résolution, ne l’ont pas fait. Quant aux pays de l’Union Européenne, dont la France et le Royaume Uni, l’unanimité était de mise, non seulement sur le vote, mais aussi pour le parrainage.

Le momentum, O combien  fragilisé fin juillet, est à nouveau bien reconstitué. Il ne faudrait finalement qu’une compression magique du temps à venir pour que tout ces Etats se retrouvent au travail dès le 18 mars 2013 – 10 heures.

Benoît Muracciole


[2] France, Etats Unis et Royaume Uni.

[3] Un beau pied de nez à ceux qui disaient que les pays de ce continent étaient pays incapables de se mobiliser.

[4] Car l’Union Européenne continue de maintenir un embargo sur les armes qui semble aujourd’hui punitif et avoir perdu son sens premier.





Un vote historique à l’ONU confirme des négociations finales pour le traité sur le commerce des armes classiques du 18 au 28 mars 2013

8 11 2012

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Vote des Etats lord de la première commission de l’Assemblée Générale de l’ONU

Paris, le 7 novembre 2012

 Le 7 novembre 2012, 157 pays – dont la Chine, la France, les Etats-Unis et le Royaume-Uni – ont voté lors de l’Assemblée Générale de l’ONU en faveur de la résolution 1/67, relative au traité sur le commerce des armes classiques, présentée par ses 7 états co-auteurs[1]. De par cette résolution, le texte présenté le 26 juillet dernier par le Président de ce même processus onusien, l’ambassadeur Roberto Garcia Moritan, sera désormais la base des négociations de cette ultime conférence de mars 2013. Après le demi-échec de la conférence de juillet dernier, cela constitue un signal fort à l’adresse des millions de personnes qui subissent au quotidien la menace de la violence des armes.

ASER (Action Sécurité Ethique Républicaines), et aussi Amnesty International, Caritas Internationalis, le World Council Forum, ONG composantes du RAIAL[2], avaient sollicité les états membres afin qu’ils posent un soutien supplémentaire à cette résolution en la parrainant. 107 d’entre eux ont répondu favorablement à cet appel, apportant leur caution à ce texte et, ce faisant, affichant leur engagement à ce que ce traité soit au plus vite définitivement établi.

 

Aujourd’hui plus que jamais, c’est un message d’espoir envoyé aux millions de femmes, d’hommes et d’enfants de Syrie, d’Afghanistan, du Guatemala, du Mexique, de la Lybie ou de la République Démocratique du Congo, qui vivent sous la menace directe des armes classiques, utilisées pour commettre contre eux les graves violations des droits de l’Homme et du droit international humanitaire.

 

A l’ensemble des ONG présentes dans ces négociations de faire front commun pour que ce traité sur le commerce des armes soit adopté dans les meilleurs délais et aux meilleures conditions.

 

 

ASER, Action Sécurité Ethique Républicaines, est une association qui lutte pour le respect des droits de l’homme dans les transferts d’armes et dans l’exercice du maintien de l’ordre par les forces de police.

Contacts :

Agnes de Monpezat : +336 47 10 40 71

Benoît Muracciole : 06 84 10 62 18


[1] Argentine, Australie, Costa Rica, Finlande, Japon, Kenya et Royaume Uni.

[2] Réseau d’Action Internationale sur les Armes Légères qui réunit près de 300 ONG dans le monde.