Les impasses de la politique extérieure de la France 

1 03 2023

De tout temps il y eut des dictatures respectées ou honnies selon la politique des gouvernements français et ces dernières années n’ont pas fait exception à la règle. Cependant c’est à la fin du XXème siècle que cette politique apparaît publiquement avec l’intervention militaire de 1991 en Irak. D’abord adulé dans les années 1980, période pendant laquelle la France avait armé ce régime dans le cadre du conflit avec l’Iran[1] (1980-1988), Saddam Hussein fut ensuite abominé et les populations irakiennes furent soumises à une succession d’interventions militaires où le droit international fut rarement présent. L’opinion publique française découvrit alors l’ampleur des ventes de matériels de guerre et le cynisme avec lequel les gouvernements avaient soutenu Saddam Hussein. Trois années plus tard c’est au tour de Paul Kagame Président du Rwanda. Vilipendé depuis 1994, il reçoit l’imprimatur d’Emmanuel Macron en 2018, il est pourtant responsable de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité perpétrés en République démocratique du Congo (RDC)[2]. En 2003 en Côte d’Ivoire c’est le Président Laurent Gbagbo qui passe de la lumière à l’ombre de la répression de l’armée française. Presque dans la continuité et toujours dans cette implacable logique Mouammar Kadhafi, qui avait été reçu avec les honneurs par le gouvernement de Sarkozy en 2007, a été assassiné en 2011, par une coalition armée co-dirigée par ce même Président Français. Puis vint le tour de Bachar al Assad qui « ne méritait pas d’être sur terre » selon le ministre des Affaires Étrangères Laurent Fabius en 2012, soutenu par l’ensemble du gouvernement, alors que 4 années auparavant il était invité d’honneur pour le défilé du 14 juillet. En 2020 il semble que les mêmes se soient accommodés  du « dictateur sanguinaire » syrien. Enfin lors de l’année 2022 les gouvernements Malien et Burkinabé, issus de coups d’État récents, expulsent l’armée française après des années d’immixtions de celle-ci dans les affaires de ces deux pays. Leurs nouveaux dirigeants deviennent aussitôt les démons des ex-pré-carrés Français. 

Ces changements d’alliance de la France, surtout lorsqu’elles entrainent des guerres, furent désastreux pour les populations de tous les pays cités. Non seulement leurs droits fondamentaux ont été bafoués mais la promesse de paix et de sécurité fut une honteuse tromperie. 

Or depuis le début du XXIème siècle le discours des autorités françaises a changé avec l’apparition de la responsabilité de protéger. Ce nouveau concept poussé par des ONGG (Organisations non gouvernementales « gouvernementales ») en mal de financements et donc d’images, a remplacé le respect des droits de l’Homme qui a peu à peu disparu des éléments de langage du gouvernement. Souvent trop précis, trop encadrés par de nombreuses conventions, ces droits longtemps mis en avant avait fait leurs temps pour les gouvernements et les ONGG. La forfaiture de la France « patrie des droits de l’Homme » avait été démasquée par les jeunesses des pays du sud. Il fallait trouver une échappatoire pour cacher la misère de « l’expertise France ». C’est ainsi que s’élabora avec François Hollande un nouveau récit des interventions françaises comme en République Centrafricaine. L’intervention devait prévenir un génocide auquel beaucoup de Centrafricains, dont des leaders religieux, ne croyaient pas. Par contre il fait peu de doute que les ressources naturelles du pays, dont l’uranium, ainsi que le marché centrafricain intéressaient les entreprises françaises[3]. C’est aussi pour défendre ses intérêts financiers et industriels que la France est intervenue militairement au Mali. Pourtant aucune colonne « djihadiste » ne menaçait Bamako[4], nulle preuve d’une menace sur le gouvernement malien n’a été présentée aux citoyens·nes français·es, ni aux parlementaires.

Mais les changements sémantiques de la politique extérieure du gouvernement français se voulant le champion du « droit de protéger », n’intéressent aujourd’hui plus grand monde et le discours du Président Macron, en date du 27 février 2023, entérine définitivement cet état de fait. Son nouveau partenariat avec l’Afrique ignore la singularité des cultures et des peuples de ce continent ainsi que leurs droits fondamentaux.  Il sonne creux comme le bois dévoré par les termites ou comme la pensée stratégique de la France.  Une surdité ultime malgré les mots forts du pape François en RDC à l’égard des pays extérieurs au continent : « Ôtez vos mains de l’Afrique ».

Jean Claude Alt

Benoît Muracciole


[1] Et en même temps  l’Iran de l’ayatollah Khomeini avec Luchaire et Matra

[2] Pays pour lequel International Rescue Committee recense 5,4 millions de morts directes et indirectes entre 1998 et 2007 par toutes les parties impliquées dans le conflit.

[3] Dont Orange, Bolloré/MSC, Total, MOCAF (Groupe Castel, les boissons), SUCAF (Groupe SOMDIIA, sucre), Powers Security (Groupe SERIS, sécurité), OLEA (assurances), Air France et Areva

[4] https://www.lopinion.fr/international/mali-les-colonnes-jihadistes-foncant-sur-bamako-en-2013-une-legende Jean Dominique Merchet, L’Opinion, 12 février 2021





3° jour de la conférence du TCA des Nations Unies droits

25 08 2022





2 jour de la conférence du TCA des Nations Unies Genève

24 08 2022

Évènement du 23 août 2022 sous la présidence de Mexico





1° jour de la 8° conférence des Etats parties TCA

23 08 2022




Levée du secret défense dans la guerre au Yémen : ASER saisit la CADA 

14 07 2022

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Ce jour, le 14 juillet 2022, notre avocat Matteo Bonaglia saisit la Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA) au nom d’Action Sécurité Éthique Républicaines (ASER) pour demander la déclassification de l’ensemble des licences d’exportation des entreprises soumises à l’article L2335-3 du code de la défense, portant sur les matériels de guerre, armes, munitions et leurs éléments désignés visés au I° de l’article L2331-1 du code de la défense, qui ont servi à des exportations à destination des pays impliqués dans le conflit au Yémen. 

La saisie de la CADA est rendue possible par l’absence de réponse (valant refus implicite) du Premier ministre, Jean Castex à l’époque, et de la ministre des Armées, Florence Parly à l’époque –  à la demande d’ASER tendant à la déclassification d’une part de l’ensemble des licences d’exportation à destination de la coalition des pays dirigée par l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis engagés dans le conflit au Yémen et d’autre part des notes de la Direction du renseignement militaire qui portent sur la situation au Yémen depuis 2015.

Pour mémoire, la décision d’ASER de produire dans sa requête et mémoire du référé suspension du 7 mai 2019 des informations classées secret défense mise en ligne par l’association Disclose avait valu au Président d’ASER une convocation par la DGSI, puis un classement avec suite du procureur de la République.

ASER avait saisi le tribunal administratif de Paris en 2018 pour mettre fin aux transferts d’armes autorisés par le gouvernement français vers la coalition impliquée dans la guerre au Yémen. La lenteur de notre justice, ASER attend toujours la décision du Conseil d’État quant à la légalité de ces transferts, est un déni de justice vis-à-vis de la population yéménite dans un conflit qui aurait fait près de 400 000 morts fin 2021. 

La date du 14 juillet n’est en rien fortuite, c’est ce jour de 1789 où les peuples français se soulevaient face à un pouvoir aveugle quant aux demandes de justice des citoyens·nes français·es « considérant que l’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de l’Homme sont les seules causes des malheurs publics et de la corruption des Gouvernements ». 

ASER est membre du Réseau d’Action International sur les Armes Légères (RAIAL), 

ASER a le statut consultatif spécial ECOSOC aux Nations Unies