Le 10 décembre dernier au tribunal de Bobigny, des policiers ont été condamnés pour « dénonciation calomnieuse et faux et usage de faux en écriture publique». Ils avaient accusé le conducteur qu’ils poursuivaient d’avoir percuté leur propre voiture et l’avaient placé en garde-à-vue sous l’accusation de « tentative d’assassinat sur un fonctionnaire de police ». Les faits ont démontré que les policiers avaient été percutés par une autre voiture de police, innocentant de fait le conducteur accusé.
L’association ASER, regroupant des anciens policiers, chercheurs, militants des droits de l’homme, est stupéfaite de voir que le Ministre de l’Intérieur et un Préfet, fait rarissime dans l’histoire de la cinquième République, soutiennent ces fonctionnaires délinquants, mettant en cause une décision de justice en complète contradiction avec les textes internationaux auxquels la France est partie et en oubliant que la séparation des pouvoirs existe. Ces fonctionnaires sont jugés pour des faits qui auraient pu faire condamner un citoyen lambda à 15 ans de réclusion criminelle.
Cette affaire pose de manière éclatante la question du professionnalisme policier et nous amène à nous demander ce qui définit un bon policier ? Faire du chiffre, laisser de côté l’investigation et la prévention qui ne permettent pas de présenter de « bons chiffres » comme le dénonce des syndicats de policiers comme SGP FO. Et cela fut-ce en tordant le bras au droit, à la déontologie et à l’honneur ?
La mission de sécurité publique et de maintien de l’ordre exige un comportement exemplaire et une grande rigueur qui sont rappelons le, inscrits dans le code de déontologie de la police. Un bon policier ne doit-il pas garantir les libertés, défendre les institutions de la République, maintenir la paix et l’ordre public, protéger les personnes et les biens (article 1). Ne doit-il pas être loyal envers les institutions républicaines, intègre et impartial, se comporter envers les citoyens d’une manière exemplaire (article 7). Que faisaient donc ces individus dans la police ? Comment les services qui les ont recrutés, leur hiérarchie, leurs collègues ont-ils pu ne pas se rendre compte qu’il y avait une erreur manifeste de recrutement, que leur formation et leur suivi n’ont pas produit les effets attendus.
La majorité des policiers ne se reconnaissent pas dans leurs collègues délinquants. Un bon professionnel, c’est certes celui qui maîtrise les techniques, mais c’est aussi celui qui les met en œuvre dans un cadre déterminé par la loi au service et pour la sécurité des citoyens. C’est celui qui a l’intelligence des situations, avec qui vous ne vous retrouverez pas dans des situations critiques et qui rentre chez lui le soir en pouvant dire à ses enfants ce qu’il a fait dans la journée. C’est aussi celui dont les victimes comme les auteurs d’infraction pourront dire qu’ils ont été correctement traités.
Les personnes condamnées à Bobigny s’étaient trompées de métier. Le Ministre de l’Intérieur et le Préfet de Seine-Saint-Denis se trompent de défense. Le Premier Ministre l’a justement rappelé. Soutenir la profession, c’est condamner ce type de comportement. C’est pour cela que la reconduction de la Commission Nationale de le Sécurité et de la Déontologie au sein d’un Défenseur des droits indépendant est entre autres essentielle pour reconstruire une véritable relation de confiance entre la police et les citoyens.
Leila Bouache Leboucher, Georges Guillermou, Benoît Muracciole, Bernard Renault, Christophe Saintmartin
ASER : Action Sécurité Éthique Républicaine réunit des chercheurs et des policiers de tous grades qui travaillent au renforcement de la déontologie et de la formation des policiers pour un rapprochement de la police et des citoyens.
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